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"Gilets jaunes": près de 283.000 manifestants, un mort et 200 blessés sur les barrages

Samedi 17 Novembre 2018

Paris - Près de 283.000 "gilets jaunes" ont protesté samedi dans toute la France contre la hausse des taxes sur le carburant et la baisse du pouvoir d'achat, au sein de 2.000 rassemblements parfois tendus qui ont entraîné des accidents faisant un mort et 227 blessés.

Sept personnes sont gravement blessées, dont un policier, a annoncé le ministère lors d'une conférence de presse. En début de soirée, plus 200 points de blocages n'avaient pas encore été levés et des manifestants étaient toujours présents sur plus de 1.400 lieux de rassemblement.
 
"Gilets jaunes, colère noire", "Jupiter, redescends sur terre, c'est la misère": les manifestants, qui arboraient parfois un message sur leur gilets, bloquaient des autoroutes, des ronds-points, des hypermarchés ou organisaient des opérations de péage gratuit dans l'ensemble du pays.

Au total 282.710 personnes ont participé aux manifestations, selon le ministère de l'Intérieur.

Les "gilets jaunes" n'ont pas réussi à bloquer la France, comme ils le voulaient, mais tout le territoire a été touché par leurs actions, ce qui représente un succès certain pour ce mouvement, parti des réseaux sociaux et organisé en dehors des partis politiques et des syndicats.

Premier responsable syndical à s'exprimer samedi soir, le patron de la CFDT Laurent Berger a appelé Emmanuel Macron à "réunir très rapidement" syndicats, patronat et associations "pour construire un pacte social de la conversion écologique". "Justice sociale et écologie sont compatibles ! Il y a urgence", a-t-il estimé dans un tweet.

- Nuit sur les barrages -

Des manifestants ont annoncé qu'ils comptaient camper et passer la nuit sur leurs barrages et certains souhaitaient poursuivre le mouvement dimanche. L'accès à certaines autoroutes restait coupé ou difficile en début de soirée.

Fred, l'un des porte-parole du mouvement à Millau a promis que les manifestants allaient "se relayer toute la nuit". "Si demain il faut continuer on continuera. Et lundi, on continuera s'il n'ont pas compris". 

Après plusieurs heures de tensions entre manifestants et forces de l'ordre dans le quartier du Palais de l'Élysée à Paris, la majorité des "gilets jaunes" s'est dispersée. Il n'y a eu aucun blessé, aucune dégradation, d'après le préfet de police de Paris, Michel Delpuech. 

"La différence entre mon brut et mon net, c'est 1.000 euros, voilà pourquoi je suis là aujourd'hui", a déclaré parmi ces manifestants Valentine, 24 ans, intermittente du spectacle qui vit en Seine-Saint-Denis. "Aujourd'hui on travaille pour survivre, plus pour vivre", a renchéri Amandine, 35 ans, assistante maternelle.

En France, il y a eu 117 interpellations, suivies de 73 garde-à-vue, selon le ministère de l'Intérieur.

Au Pont-de-Beauvoisin (Savoie), une conductrice qui emmenait sa fille chez le médecin a été prise de panique quand les manifestants se sont mis à taper sur sa voiture. Elle a foncé alors sur eux, percutant mortellement une femme de 63 ans. 

Cette manifestation, comme de nombreuses autres, n'était pas déclarée.

"J'en appelle à la responsabilité de ceux qui organisent ces manifestations. Ils ont porté un message. Il est entendu", a déclaré le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.

"Le gouvernement est attentif à toutes les mobilisations, nous devons maintenant continuer à répondre aux attentes des Français y compris en terme de pouvoir d'achat", a-t-il ajouté.

Les autorités s'inquiètent de la poursuite du mouvement malgré la nuit: "Les manifestations aujourd'hui bon enfant, ce soir se transforment avec l'arrivée de casseurs", a déploré Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), qui a précisé que des cocktails molotov ont été jetés contre les forces de l'ordre.

Et "la nuit, le danger c'est d'être percuté par un véhicule", a-t-il rappelé alors que 5.000 patrouilles resteront mobilisées jusqu'à dimanche matin. 

- "Signe extérieur de pauvreté" -

Une étude publiée samedi par L'Argus note que les départements où les automobilistes roulent le plus en véhicule diesel sont aussi ceux où résident le plus de ménages non imposés. Le diesel est devenu un "signe extérieur de pauvreté", en déduit la publication spécialisée.

Samedi soir un conseiller de l'exécutif a reconnu qu'il y avait "une mobilisation qui est là, il ne faut pas la nier".

Mais "elle n'était pas au niveau attendu. Ce n'est pas le raz-de-marée attendu, malgré un battage médiatique parfois surprenant".

Dans l'opposition, certains sont descendus dans la rue: Laurent Wauquiez, le chef de LR, a appelé Macron à comprendre et "corriger ses erreurs". 

Des élus du Rassemblement national étaient également présents aux côtés des "gilets jaunes", mais pas Marine Le Pen. 

Des Insoumis participaient aussi aux manifestations. Leur leader Jean-Luc Mélenchon a critiqué sur Twitter une "manipulation des chiffres de participation" et une "dramatisation" de la part du gouvernement. Il s'est rendu place de la Concorde mais sans porter de gilet jaune.

A l'initiative de cette grogne, des membres de la société civile se sont mobilisés contre la hausse du prix des carburants avant que les motifs de grief ne s'élargissent à une dénonciation plus globale de la politique du gouvernement en matière de taxation et à la baisse du pouvoir d'achat.

Au 1er janvier 2019, les taxes sur le gazole doivent augmenter de 6,5 centimes d'euro par litre et celles sur l'essence de 2,9 centimes.

Pour le politologue Jean-Marie Pernot, chercheur à l'Ires, c'est un "succès de participation". "On va voir ce qu'ils inventent pour poursuivre la pression, (...) ce qu'ils vont choisir pour entretenir la flamme". 
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