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Selon son avocat, Trump a agi dans «l'intérêt général»

Jeudi 30 Janvier 2020

Donald Trump peut-il commettre un abus de pouvoir au nom de l'intérêt général? La question a agité le Sénat pour la deuxième séance de questions au procès en destitution du président. C'était aussi la dernière chance des démocrates de convaincre les républicains d'entendre de nouveaux témoins.
 
L'un des avocats du locataire de la Maison Blanche, le célèbre constitutionnaliste Alan Dershowitz, s'est fait remarquer mercredi avec un argument massue. Si un président pense être «le meilleur président de tous les temps», il «ne mérite pas» d'être destitué pour avoir agi, dans «l'intérêt général», de façon à s'assurer un nouveau mandat, a-t-il avancé. L'explication a provoqué la stupeur de l'opposition, qui y voit la justification d'un pouvoir présidentiel illimité.
 
«Pire» que le Watergate
 
«C'est stupéfiant (...) si on accepte qu'un président puisse faire ce qu'il veut pour être réélu», a résumé jeudi Adam Schiff, qui dirige l'équipe des procureurs démocrates, dénonçant un «argument montrant le désespoir» de la défense.
 
«La situation est pire qu'il y a 50 ans» et l'affaire du Watergate qui avait forcé Richard Nixon à démissionner pour éviter une destitution certaine, a-t-il affirmé aux cent sénateurs. «L'argument de M. Dershowitz libérerait un monstre, ou plus précisément un monarque», a pour sa part assuré le chef des sénateurs démocrates Chuck Schumer.
 
«Aucune preuve»
 
Le 45e président des Etats-Unis est accusé d'abus de pouvoir pour avoir, selon l'opposition, conditionné l'été dernier le versement à l'Ukraine d'une aide militaire cruciale pour ce pays allié aux prises avec une rébellion pro-russe à une enquête des autorités ukrainiennes sur Joe Biden, un adversaire potentiel à la présidentielle de novembre.
 
Le milliardaire a également été mis en accusation pour entrave à la bonne marche du Congrès pour avoir interdit à ses collaborateurs, une fois l'affaire révélée, de participer à l'enquête parlementaire lancée par les démocrates à la Chambre des représentants.
 
La défense de Donald Trump affirme que le président s'inquiétait de l'étendue de la corruption en Ukraine et des activités du fils de Joe Biden, Hunter, alors salarié d'un groupe gazier ukrainien un temps soupçonné de malversations. «Il n'y a aucune preuve d'un lien (entre l'enquête et le versement de l'aide), pas de 'donnant-donnant' dans cette affaire», a affirmé l'avocat de la Maison Blanche Patrick Philbin.
 
Vote sur les témoins vendredi
 
Les déclarations d'Alan Dershowitz ont aussi fait bondir plusieurs spécialistes du droit. Neal Katyal, de l'université de Georgetown, a dénoncé un argument «fou» et «insensé» dans son compte-rendu quotidien des débats sur Instagram. Face aux critiques, l'avocat a assuré jeudi que ses propos avaient été volontairement déformés par les médias opposés à Donald Trump.
 
Cette dernière journée de questions posées par les sénateurs, par écrit, devrait aussi être la dernière chance pour le camp démocrate de convaincre des élus de la majorité républicaine de convoquer de nouveaux témoins jugés essentiels pour un procès équitable. Un vote sur la question est prévu vendredi en fin de journée.
 
Ils veulent notamment entendre l'ancien conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, John Bolton, dont un livre à paraître prochainement contient des confidences embarrassantes pour le président. Limogé en septembre, John Bolton affirme que le président lui a dit en août ne pas vouloir débloquer l'aide militaire destinée à l'Ukraine tant que ce pays n'enquêterait pas sur les Biden.
 
Il s'est dit prêt à témoigner devant le Sénat, ce que rejettent les avocats de la Maison Blanche, qui invoquent un risque pour la sécurité nationale.
 
Certitudes ébranlées
 
Les démocrates savent que le président a toutes les chances d'être acquitté, la Constitution imposant une majorité des deux tiers (67 voix) pour le destituer. Les 53 sénateurs républicains ont jusqu'ici fait bloc derrière l'ancien magnat.
 
Mais les révélations de John Bolton ont ébranlé les certitudes des plus modérés. Si le vote sur les témoins, qui nécessite lui une majorité simple, s'achevait sur une égalité (50-50), Adam Schiff s'est dit prêt à demander au chef de la Cour suprême John Roberts, qui préside le procès, d'apporter sa voix déterminante. Mais celui-ci peut décliner. (afp/nxp)
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