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Farba Ngom - Les conclusions détaillées de la Commission ad hoc qui a proposé la levée de son immunité parlementaire

Vendredi 24 Janvier 2025

« Conformément aux dispositions des articles 61 de la Constitution et 52 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, la Commission ad hoc a été constituée, à travers la Résolution n°01/2025 du 17 janvier 2025, pour examiner la demande de levée de l’immunité parlementaire du Député Mouhamadou NGOM, suite à la saisine de Monsieur le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux par lettre n°000012/MJ/CAB/DC du 10 janvier 2025. Cette saisine fait suite à une correspondance du Procureur général près la Cour d’Appel de Dakar du 3 janvier 2025, transmettant la requête formulée par le Procureur de la République financier près le Pool judiciaire financier (PJF) datée du même jour.

 

Monsieur Abdoulaye TALL, en sa qualité de Président de la Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains et membre de la Commission ad hoc, a dirigé les travaux de la première réunion, tenue le 17 janvier 2025, dans la salle de la Commission des Finances.

 

Cette réunion a été consacrée à l’installation du bureau de la Commission et à l’établissement du calendrier de travail. 

Prenant la parole, Monsieur Abdoulaye TALL a remercié ses collègues après avoir constaté la présence effective de tous les membres. Dans la foulée, le Bureau de la Commission a été officiellement installé, sous sa présidence, dont la composition se présente comme suit :

 

  • Président : Monsieur Abdoulaye TALL ;
  • Premier Vice-président : Monsieur Mohamed Ayib Salim DAFFE ;
  • Deuxième Vice-présidente : Madame Mbène FAYE ;
  • Rapporteur : Monsieur Youngare DIONE.

 

Il a été procédé, en outre, à la lecture de la liste des autres membres de la Commission à savoir : Madame Anta DIA ; Monsieur Ansoumana SARR ; Monsieur Djimo SOUARE ; Madame Fatou BA ; Madame Amy DIA ; Monsieur Alioune NDAO ; Monsieur Cheikh Ahmed Tidiane YOUM.

 

Une fois le Bureau installé, Monsieur le Président a invité les membres de la Commission à consacrer les efforts pour un travail de qualité, avec toute la sérénité requise, afin de répondre aux attentes de l’Institution parlementaire. 

 

Il a aussi rappelé que les membres de la Commission sont tenus au respect de l’obligation de réserve, laquelle est dictée par l’impérative préservation du caractère confidentiel des documents qui leur sont transmis. Il a ainsi donné rendez-vous aux membres à la prochaine réunion prévue le 21 janvier 2025, à 16 heures, date à laquelle Monsieur le Député Mouhamadou NGOM devra être convoqué pour son audition, conformément à l’article 52 alinéa 2 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Ainsi, la séance a été levée.

Advenu cette date, la Commission s’est encore réunie sous la présidence de Monsieur Abdoulaye TALL, dans la salle Marie Joséphine DIALLO. En prélude aux travaux, Monsieur le Président est revenu sur les deux points inscrits à l’ordre du jour : 

  •  
  • Rappel de la procédure ;
  • Convocation de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM.

 

  • Rappel de la procédure :

 

Le Président est revenu sur les différentes étapes de la procédure suivie à l’Assemblée nationale depuis la réception de la demande de levée de l’immunité parlementaire :

  • réunion du Bureau de l’Assemblée nationale (14 janvier 2025) ;
  • réunion de la Conférence des Présidents (14 janvier 2025) ;
  • réunion de la Commission des Lois pour la mise en place de la Commission ad hoc (16 janvier 2025 après acceptation de la demande de report d’un jour exprimée par la Présidente du Groupe Takku Wallu pour préparer la défense du député) ;
  • séance plénière pour le vote du projet de résolution portant création de la Commission ad hoc (17 janvier 2025) ;
  • réunion de la Commission ad hoc (17 janvier 2025) ;
  • mise en place du bureau et fixation du calendrier de travail de la commission ad hoc (17 janvier 2025).

 

  • Convocation de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM :

 

Sur ce point, une première convocation a été envoyée, le 17 janvier 2025, au domicile du Député Mouhamadou NGOM, pour les besoins de son audition, prévue le 21 janvier 2025. Mais,  notre collègue, à travers le vigile trouvé sur place, a refusé de prendre la convocation.

Face à cette situation, l’Etude de Maître Weyndé DIENG, Huissier de Justice à Dakar, a été commise aux fins de notifier la convocation. L’Huissier de Justice, arrivé au domicile de Monsieur Mouhamadou NGOM, à l’adresse mentionnée dans la convocation, a rencontré les difficultés ci-après :

 

Selon l’Huissier de Justice, le 20 janvier 2025 à 12 heures 40 minutes, 

 

«le vigile trouvé devant la porte du domicile du requis m’a interdit d’accéder à l’intérieur de la maison pour rencontrer le Sieur NGOM, au motif que, ce dernier n’était pas encore réveillé. Je lui ai alors proposé de réceptionner l’exploit au nom de Monsieur NGOM, ce qu’il a catégoriquement refusé. Je me suis alors rendu à la Mairie de Ngor pour y déposer copie conformément à la loi et informer le concerné par lettre recommandée avec accusé de réception. »

 

Ainsi, Monsieur le Président a annoncé avoir reçu une lettre en date du 20 janvier 2025 de Madame Aïssata TALL, agissant  ès qualité de défenseur de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM et sollicitant la mise à sa disposition des pièces du dossier relatif à la présente procédure de levée de l’immunité parlementaire.

 

Le même jour, Monsieur le Président dira avoir répondu favorablement à cette requête en lui transmettant les copies de toutes les pièces, à savoir :

  •  
  • 1). lettre n°000012/MJ/CAB/DC du 10 janvier 2025 de Monsieur le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux adressée au Président de l’Assemblée nationale et transmettant la correspondance du Procureur général près la Cour d’Appel de Dakar portant sur la demande de levée de l’immunité parlementaire du Député Mouhamadou NGOM, formulée par le Procureur de la République financier près le Pool judiciaire financier (PJF) ;
  •  
  • 2). lettre n°000005/PGDK du 03 janvier 2025 adressée au Ministre de la Justice, Garde des Sceaux du Procureur général près la Cour d’Appel de Dakar  pour transmettre la demande de levée de l’immunité parlementaire de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM ;
  •  
  • 3). lettre n°18 Conf/PF/PJF/MJ du 03 janvier 2025 du Procureur de la République financier adressée au Procureur général près la Cour d’Appel de Dakar portant Demande de levée de l’immunité parlementaire d’un député ; 
  •  
  • 4). demande motivée du Procureur de la République financier datée du 3 janvier 2025 portant levée de l’immunité parlementaire de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM.

 

Après ces rappels, Monsieur le Président a procédé à la lecture intégrale de la demande de levée de l’immunité parlementaire formulée par le Procureur de la République financier. Ce dernier a mentionné dans sa demande avoir été saisi de rapports de la Cellule Nationale de Traitement des Informations financières (CENTIF) concernant le Député Mouhamadou NGOM. Il résulte de ces rapports, selon le Procureur, des faits susceptibles d’être qualifiés d’association de malfaiteurs, blanchiment de capitaux, escroquerie portant sur les deniers publics, trafic d’influence, fraude fiscale, abus de biens sociaux et de complicité dans la commission des trois premières infractions.   

 

Ces faits sont prévus et punis par  les articles :

  •  
  • 679 du Code général des Impôts ;
  • 9 et 185 de la loi n° 2024-08 du 02 février 2024 relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive ; 
  • 45, 153, 160 et 161 du Code pénal ;
  • 891 de l’Acte uniforme sur les sociétés commerciales et les GIE. 

 

Conformément aux dispositions du Code de Procédure pénale et à l’article 66 de la loi n° 2024-08 du 02 février 2024 relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive, il est envisagé l’ouverture de deux procédures d’informations judicaires auprès d’un cabinet d’instruction du Pool judicaire financier. 

 

Toutefois, il résulte des articles 61 de la Constitution et 51 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale qu’« aucun membre de l’Assemblée nationale ne peut, pendant la durée des sessions être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée nationale ». 

 

Par conséquent, le Sieur Mouhamadou NGOM, cité par les rapports de la CENTIF, étant Député à l’Assemblée nationale, le Procureur de la République financier sollicite, conformément aux dispositions citées ci-dessus, la saisine de l’Assemblée nationale aux fins de faire lever son immunité parlementaire en vue des poursuites évoquées.

 

Après la lecture de la demande de levée de l’immunité parlementaire, le Président de la Commission ad hoc a  donné la parole à Madame Aïssata TALL, défenseur de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM, pour ses observations. 

 

Celle-ci a axé son discours sur deux (02) points qu’elle considère comme factuels. 

Sur le premier point, elle a indiqué que notre collègue n’a jamais refusé de comparaître. Selon elle, il a été retenu, dès le début de la procédure, que c’est elle qui sera son défenseur et pour ce faire, il y avait trois (03) options à considérer :

  •  
  • première option : présence de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM assisté de son défenseur ;
  • deuxième option : présence uniquement de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM ;
  • troisième option : présence uniquement de son défenseur.

 

Elle a informé que notre collègue a finalement choisi la troisième option afin, dira-t-elle, de mettre à l’aise les membres de la Commission ad hoc et de leur permettre de travailler librement.

 

En outre, elle a soutenu que le Procureur de la République financier a articulé des faits et a fait référence à deux rapports de la CENTIF numéros 41 et 51 en date du 20 décembre 2024. 

 

D’après elle, ces rapports devraient être mis à la disposition des membres de la Commission ad hoc pour leur permettre de connaitre de l’exactitude des faits reprochés à Monsieur le Député Mouhamadou NGOM. 

 

Madame le défenseur a également relevé qu’en l’espèce, le dossier de poursuite équivaut à une lettre de transmission, alors que le Procureur général près la Cour d’Appel de Dakar et le Procureur de la République financier auraient dû transmettre ces fameux rapports.

 

Sur ce, elle a demandé la suspension de la séance jusqu’à ce que ces documents soient communiqués aux membres de la Commission ad hoc. Elle a, en outre, laissé entendre que si cette demande n’est pas honorée, elle serait dans l’obligation de se retirer.

 

Sur cette question, un Commissaire a soutenu que, lors de la première réunion, Monsieur le Président Abdoulaye TALL avait fait allusion à ces rapports de la Cellule nationale de Traitement des Informations financières (CENTIF) ayant servi de base à la saisine du Procureur de la République financier. Or, les membres de la Commission ad hoc ne disposent que des trois (3) lettres susmentionnées. Pour les mêmes raisons, il a également demandé la suspension de la séance jusqu’à la transmission de ces rapports de la CENTIF. 

 

Toutefois, d’autres Commissaires ont tenu à préciser que les conditions de déroulement des travaux de la Commission ad hoc sont respectées, conformément à l’article 52 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale qui dispose :

 

« Il est constitué, pour chaque demande de levée de l’immunité parlementaire d’un député ou pour chaque demande de suspension de poursuites déjà engagées, une Commission ad hoc de onze (11) membres nommés selon la procédure prévue à l’article 34.

 

La Commission doit entendre le député intéressé, lequel peut choisir, comme défenseur, un de ses collègues.

 

Lors des débats ouverts par l’Assemblée nationale, en séance plénière, sur les questions d’immunité, peuvent seuls prendre la parole, le Président, le Rapporteur de la Commission, le Gouvernement, le député ou son défenseur et un orateur contre. »

 

Ainsi, cet article, préciseront-ils, pose juste le principe du contradictoire, à travers l’audition du Député concerné. Ce principe a été respecté du moment où Madame Aïssata TALL s’est présentée devant la Commission ès qualité de défenseur du collègue mis en cause.

 

Les Commissaires ont ajouté que la Commission ad hoc ne saurait être confondue avec la Commission d’enquête parlementaire qui dispose de larges pouvoirs d’investigation. Elle n’est ni un organe de poursuite, ni un cabinet d’instruction et encore moins une instance juridictionnelle. 

 

En l’espèce, c’est le pouvoir judiciaire qui sollicite la collaboration du pouvoir législatif dans le cadre de la procédure de levée de l’immunité parlementaire d’un député sur des faits déterminés en se basant notamment sur des rapports de la CENTIF à la suite de déclarations de soupçon qui obligent le parquet financier à saisir immédiatement le juge d’instruction. 

 

Selon ces mêmes Commissaires, le Procureur de la République financier a suffisamment  motivé sa demande et clairement indiqué les chefs d’accusation en vertu desquels notre collègue est susceptible d’être poursuivi. Ils diront, dans ce sens, que cette présente procédure, au-delà qu’elle soit parfaitement conforme à la pratique parlementaire, respecte les dispositions pertinentes des articles 61 de la Constitution et 52 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale. 

 

Sous le bénéfice de ces considérations, Monsieur le Président Abdoulaye TALL a demandé au défenseur du Député Mouhamadou NGOM de se retirer de la salle,  afin de permettre à la Commission ad hoc de statuer sur la  demande de suspension des travaux jusqu’à la mise à disposition des rapports de la CENTIF à la Commission ad hoc. 

 

À l’issue du vote, dix (10) membres ont été favorables à la poursuite des travaux et un (01) membre a manifesté son désaccord. 

 

Monsieur le Président a, par la suite, invité le défenseur de Monsieur le Député Mouhamadou NGOM à regagner la salle pour l’informer de la décision de poursuite des travaux largement exprimée par les membres de la Commission ad hoc.

 

Madame le défenseur dira prendre acte de cette décision et a remercié les Commissaires, avant de se retirer.

 

Poursuivant les travaux, les Commissaires ont tiré les conclusions de la Commission en statuant définitivement sur la demande de levée de l’immunité parlementaire de notre collègue en procédant au vote.

 

En conséquence, la Commission ad hoc, tenant compte du caractère sérieux et motivé de  la demande du Procureur de la République financier, qui fait état de  soupçons  graves contre le Député Mouhamadou NGOM, étayés dans les rapports numéros 41 et 51 en date du 20 décembre 2024 de la CENTIF, a adopté, à une très large majorité, la décision de recommander à la séance plénière de l’Assemblée nationale, de lever l’immunité parlementaire du Député Mouhamadou NGOM, pour permettre l’ouverture des procédures d’informations judicaires et à la Justice de faire toute la lumière sur cette affaire. »    

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