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Présidentielle ivoirienne : Gbagbo appelle au dialogue sous peine de «catastrophe»

Vendredi 30 Octobre 2020

L’ancien chef d’État Laurent Gbagbo, qui ne s’était pas exprimé publiquement depuis son arrestation en 2011, est sorti de sa réserve jeudi à l’avant-veille de la présidentielle en Côte d’Ivoire pour appeler au dialogue, alors que beaucoup d’Ivoiriens redoutent de nouvelles violences autour du scrutin.
 
Le convoi du secrétaire général de la présidence ivoirienne Patrick Achi, un des directeurs de campagne d’Alassane Ouattara, a été mitraillé jeudi soir près d’Agbaou (150 km au nord d’Abidjan), sans qu’il y ait de blessés.
 
Le président Alassane Ouattara brigue un troisième mandat controversé face à une opposition qui a appelé à la «désobéissance civile». Depuis trois mois, violences et affrontements intercommunautaires ont fait une trentaine de morts.
 
«Il faut discuter»
 
«Ce qui nous attend, c’est la catastrophe. C’est pour ça que je parle. Pour qu’on sache que je ne suis pas d’accord pour aller pieds et poings liés à la catastrophe. Il faut discuter», a déclaré Laurent Gbagbo sur TV5 Monde, depuis la Belgique où il attend un éventuel procès en appel devant la Cour pénale internationale (CPI), après son acquittement en première instance de crimes contre l’humanité.
 
«Discutez! Négociez! Parlez ensemble! Il est toujours temps de le faire (…). Je suis résolument du côté de l’opposition. Je dis, vu mon expérience, qu’il faut négocier!», a insisté l’ancien président.
 
La colère, «je la comprends et je la partage». «Pourquoi veut-on faire un troisième mandat? Il faut qu’on respecte ce qu’on écrit, ce qu’on dit (…) Si on écrit une chose et qu’on fait une autre, on assiste à ce qui arrive aujourd’hui», a estimé Laurent Gbagbo, 75 ans, à propos de son ancien adversaire, Alassane Ouattara.
 
La Constitution ivoirienne n’autorise que deux mandats présidentiels, mais, selon Alassane Ouattara, l’adoption d’une nouvelle Constitution en 2016 a remis le compteur à zéro, ce que conteste farouchement l’opposition.
 
«Pas responsable» de se taire
 
La prise de parole de Laurent Gbagbo était attendue depuis des mois par ses partisans, qui espèrent son retour en Côte d’Ivoire. «Depuis mon arrestation le 11 avril 2011, je n’ai pas parlé, sauf lors de l’interrogatoire devant la CPI (…). J’attendais d’être en Côte d’Ivoire avant de parler (…), mais les querelles nous amènent dans un gouffre (…). Si je me tais, ce ne serait pas responsable, donc j’ai décidé de m’exprimer», a-t-il expliqué.
 
Laurent Gbagbo a aussi accusé Alassane Ouattara de «manque d’élégance» à son égard en ne lui fournissant pas un passeport mais souligné: «Si je veux rentrer au pays je rentre (…) mais je ne veux pas rentrer et provoquer des palabres. C’est pour ça que je ne suis pas rentré».
 
De nombreux Ivoiriens craignent une nouvelle crise majeure, dix ans après la crise post-électorale issue de la présidentielle de 2010 qui avait fait 3000 morts dans ce pays d’Afrique de l’Ouest de 25 millions d’habitants qui compte une soixantaine d’ethnies.
 
Pas de campagne de l’opposition
 
Signe de la fébrilité ambiante, de nombreux Abidjanais quittaient la ville. À une gare d’Adjamé (quartier Abidjan), point de départ pour l’intérieur du pays, des dizaines de personnes chargeaient sacs, valises et baluchons sur les bus.
 
«Je voyage aujourd’hui par rapport à ce qui s’est passé la dernière fois (la crise de 2010-2011, ndlr). J’ai peur. Je préfère rentrer en famille» à Yamoussoukro, a confié à l’AFP Sandrine Dia Amoin.
 
L’opposition, incarnée par l’ex-président Henri Konan Bédié, 86 ans et Pascal Affi N’Guessan, 67 ans, n’a pas fait campagne. Mais les deux hommes ne se sont pas formellement retirés du scrutin.
 
Ouattara, 78 ans, et Bédié, 86 ans, vieux rivaux présents sur la scène politique ivoirienne depuis trois décennies, s’affrontent donc une nouvelle fois dans un pays où l’âge moyen est de 19 ans. (AFP/NXP)
 
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