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Sénégal: le pouvoir finit par déployer les forces armées à Dakar, qui redoute une arrestation de Sonko

Samedi 3 Juin 2023

Les autorités sénégalaises ont déployé vendredi des hommes en tenue et armes de combat dans Dakar où, après le déchaînement de violence de jeudi, beaucoup redoutent un embrasement si le pouvoir fait arrêter l'opposant Ousmane Sonko, candidat à la présidentielle condamné à deux ans de prison ferme.
 
Des hommes portant treillis et fusils d'assaut ont été positionnés en différents points de Dakar, capitale habituellement grouillante aux rues à présent largement désertées et à l'activité quasiment paralysée après l'une des journées de contestation politique les plus meurtrières depuis des années, ont constaté les journalistes de l'AFP.
 
L'AFP n'a pu identifier s'il s'agissait de soldats ou de gendarmes en uniformes de camouflage. Ni le porte-parole du gouvernement ni celui de l'état-major n'ont confirmé que les autorités auraient fait appel à l'armée.
 
Le ministre de l'Intérieur Antoine Diome a assuré dans la nuit que "l'Etat du Sénégal (avait) pris toutes les mesures" pour rétablir l'ordre.
 
Le gouvernement a reconnu avoir restreint les accès aux réseaux sociaux comme Facebook, WhatsApp ou Twitter pour faire cesser selon lui "la diffusion de messages haineux et subversifs".
 
Dans la crainte des saccages, les magasins sont restés fermés le long de rues entières portant encore les traces des violences de la veille.
 
A l'université, théâtre d'affrontements prolongés et d'importantes destructions, les étudiants ont reçu la consigne de partir et nombre d'entre eux ont quitté le campus en tirant une valise pour attraper un bus ou tout autre moyen de transport.
 
"Le Sénégal n'a jamais connu pareille situation", a assuré Babacar Ndiaye, étudiant de 26 ans, "nous ne nous attendions pas à ça. Les affaires politiques ne devraient pas nous concerner".
 
- "Craindre le pire" -

"Mais il y a injustice", a-t-il dit en parlant de la condamnation d'Ousmane Sonko, le plus farouche adversaire du président Macky Sall, engagé depuis deux ans dans un bras de fer acharné avec le pouvoir pour sa survie judiciaire et politique.
 
Avant les événements de jeudi, une vingtaine de civils avaient été tués depuis 2021 dans des troubles largement liés à la situation de M. Sonko. Le pouvoir et le camp de M. Sonko s'en rejettent mutuellement la faute.
 
Dakar, sa banlieue et plusieurs villes ont connu jeudi des affrontements entre jeunes et forces de sécurité et des saccages de magasins et d'équipements publics. Le ministre de l'Intérieur a fait état de neuf morts.
 
Des heurts épars ont été rapportés vendredi matin. De nouveaux appels à manifester ont circulé pour l'après-midi.
 
La conférence de presse où le sélectionneur de l'équipe nationale de football Aliou Cissé devait annoncer vendredi les joueurs retenus pour deux prochains matches a été remplacée par un communiqué. La circulation du train reliant Dakar et la ville nouvelle de Diamniado a été suspendue.
 
Les Dakarois interrogés par l'AFP ont dit craindre l'éventualité où le gouvernement ferait arrêter M. Sonko, bloqué par les forces de sécurité chez lui dans la capitale, "séquestré" selon lui.
 
"S'ils l'arrêtent, il faudra craindre le pire", disait Yankouba Sané, employé de l'université.
"S'il y a une personne qui n'ira jamais en prison au Sénégal, c'est bien Ousmane Sonko. S'ils le défèrent, ils vont aggraver la situation", abondait Alioune Diop, commerçant de 46 ans.
 
- "Perte inestimable" –
 
Le relativement jeune âge de M. Sonko, son discours souverainiste et panafricaniste, ses diatribes contre "la mafia d'Etat", les multinationales et l'emprise économique et politique exercée selon lui par l'ancienne puissance coloniale française lui valent une forte adhésion dans une jeunesse en quête de perspectives et d'espoir dans un environnement économique et social difficile. Les moins de 20 ans représentent la moitié de la population. (...) (AFP)
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