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Montréal, fer de lance de l'IA responsable

Samedi 2 Décembre 2023

Avec le retour de Sam Altman à la tête d'OpenAI, le développement jugé à marche forcée de l'intelligence artificielle (IA) inquiète de plus en plus certains experts, notamment à Montréal où l'éthique entourant cette technologie est au cœur des recherches scientifiques.

 

Pour le professeur montréalais Yoshua Bengio, considéré comme l'un des "pères fondateurs" de l'IA, à ce rythme, la technologie va rapidement "arriver au niveau de l'intelligence humaine, voire plus".

 

"Ce serait comme si on créait une nouvelle espèce sur Terre" qui pourrait "prendre des décisions qui nous nuisent et mettent même en danger l'espèce humaine", s'alarme le lauréat du prix Turing 2018, l'équivalent du Nobel pour les informaticiens.

 

La saga qui a vu le licenciement puis la réintégration, chez OpenAI, créateur de ChatGPT, du patron Sam Altman, taxé par certains de mettre la sécurité au second plan, a récemment illustré le débat sur le développement effréné de l'IA.

 

Depuis longtemps, le professeur Bengio alerte sur ces entreprises qui "ne vont pas ralentir, ne vont pas prendre de précautions, potentiellement aux dépens du public".

 

Il est essentiel de mettre en place "des règles qui vont être les mêmes pour toutes les entreprises", affirme le chercheur à la barbe poivre et sel.

 

Début novembre, il a été choisi par la communauté internationale pour rédiger le premier rapport sur "l'état de la science", une évaluation scientifique des recherches existantes, des risques et possibilités de l'IA.

 

- Concentration de chercheurs -

 

Dans son laboratoire de recherche situé dans un quartier branché de Montréal, Yoshua Bengio réunit depuis les années 1990 une "masse critique de chercheurs en IA".

 

A quelques pas du bâtiment en briques rouges, des géants américains tels que Microsoft, Meta, IBM ou encore Google ont établi une partie de leurs équipes de recherche dans le domaine.

 

"Un peu comme en Europe, il y a beaucoup d'investissements dans la recherche fondamentale au Québec. En même temps, il y a une flexibilité pour les entreprises qui nous rapproche des États-Unis", salue Hugo Larochelle, directeur scientifique de Deepmind, la division IA de Google.

 

Et rapidement, un certain nombre de chercheurs ont fait émerger une réflexion sur l'avenir de cette technologie.
 

En 2018, la métropole a ainsi été le berceau de la Déclaration de Montréal, une des premières chartes mondiales encadrant l'IA et écrite en collaboration avec le public.

 

"C'est une des singularités du Québec, c'est qu'on a su très tôt donner envie à la communauté scientifique de travailler sur comment mieux réfléchir l'intégration de l'IA pour la société", raconte Guillaume Macaux, vice-président de l'OBVIA, un observatoire de recherche indépendant.

 

Pionnier du genre, l'observatoire créé dans la foulée de la Déclaration de Montréal mise sur l'interdisciplinarité de ses chercheurs pour conseiller les politiques gouvernementales et sensibiliser le public.

 

- L'art pour "démystifier" l'IA -

 

Mais "démystifier les secrets de l'IA" est également la mission que se sont donnée des artistes de la métropole francophone.

Casque de réalité virtuelle sur le nez, la Montréalaise Sandra Rodriguez nous invite à discuter, poser des questions à une intelligence artificielle inspirée du célèbre linguiste américain Noam Chomsky.

 

Les réponses de la machine sont retranscrites instantanément devant nos yeux, le tout dans un univers futuriste.

 

En touchant le texte du bout du doigt, toutes les alternatives de réponses envisagées par l'algorithme se déroulent avec leur gradient de pourcentage associé.

 

"On réalise que c'est en fait que de la statistique", soutient la chercheuse en médias numériques au Massachusetts Institue of Technology (MIT).

 

"Montréal est un terrain de jeu fantastique", pense l'artiste aux longs cheveux noirs bouclés.

 

La "réputation en création numérique" de la ville cumulée à son expertise en IA en fait une "parfaite combinaison pour débattre des enjeux éthiques et sociétaux", souligne-t-elle.

 

Pour la créatrice, l'art devient "nécessaire plus que jamais" pour inviter "un public élargi à se poser des questions sur des enjeux de l'IA qui vont les affecter demain". [AFP]

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