Donald Trump Jr, puis Eric Trump, les deux fils de Donald Trump accusés comme leur père de vastes fraudes financières au procès civil qui menace l’empire familial, ont tenté de faire bloc jeudi au tribunal de New York, malgré un feu roulant de questions de l’accusation et des documents les impliquant dans l’affaire.
L’un après l’autre, l’aîné Donald Jr, 45 ans, puis le cadet Eric, 39 ans, deux frères aux allures similaires, costumes chics et cravate, cheveux soigneusement coiffés en arrière et barbe taillée, ont adopté une ligne de défense identique : ils ne s’occupaient pas des déclarations financières au centre du procès, une tâche laissée aux comptables, assurent-ils.
C’est à partir de ces états financiers annuels de Donald Trump, sortes de photographies de sa fortune listant ses propriétés — comme la Trump Tower à Manhattan — que le parquet général de l’État de New York accuse le père et les deux frères d’avoir gonflé la valeur des actifs du groupe dans les années 2010.
Des manœuvres frauduleuses à hauteur de milliards de dollars, destinées à obtenir des prêts plus favorables auprès des banques et de meilleures conditions d’assurance, selon l’accusation.
Des deux frères, vice-présidents exécutifs de la Trump Organization, qui en ont pris les commandes quand le père est entré à la Maison-Blanche en 2017, Eric est apparu le plus en difficulté au tribunal.
Courriels
D’emblée, il assure qu’il n’avait « pas travaillé » sur les états financiers annuels. Mais le représentant du parquet général, Andrew Amer, lui montre une longue suite de courriels, affichés sur l’écran du tribunal, semblant attester du contraire.
Le 23 août 2013, un cadre du groupe s’adresse à lui à propos de « notes » pour « la déclaration financière annuelle de M. Trump », le 22 avril 2015, c’est Allen Weisselberg, le directeur financier de la Trump Organization, qui lui glisse l’idée de rembourser un emprunt « après le 30 juin » pour garder le plus de liquidités sur l’état financier annuel.
Sous le feu des questions, lors d’un interrogatoire serré de plusieurs heures, Eric Trump perd parfois patience, et sa voix, jusqu’ici cordiale, s’élève : « nous sommes un immense groupe dans l’immobilier, bien sûr qu’il y a des déclarations financières », lâche-t-il.
Mais il a tenté de maintenir sa position : « je ne me concentre pas sur les chiffres. Je bâtis des projets ».
Les questions se sont ensuite concentrées sur « Seven Springs », une opulente résidence entourée de nature — 60 pièces, trois piscines —, l’une des plus surévaluées selon l’accusation (plus de 260 millions de dollars, contre dix fois moins selon des estimations) et dont Eric Trump dirigeait la société de gestion.
Forbes
« Je faisais confiance aux comptables », a aussi répété Donald Trump Jr un peu plus tôt.
Il a notamment été confronté à un courriel d’un journaliste du magazine financier Forbes du 3 mars 2017, contenant une longue série de questions sur la fortune de Donald Trump et remettant en cause la véritable surface de son triplex dans la Trump Tower.
« C’est dingue tout ce qu’il y a là-dedans », avait dit Donald Trump Jr dans un autre courriel, lorsqu’il avait pris connaissance des questions de Forbes.
Devant le tribunal, il ne se souvient pas bien de l’épisode. A-t-il engagé des vérifications ? « Je ne sais pas si j’en ai fait ».
Le triplex de Donald Trump fait partie des exemples cités par l’accusation, car sa valeur aurait été déclarée sur la base d’une surface près de trois fois supérieure à la réalité (2700 mètres carrés contre 1000), ce qui aurait permis de l’évaluer à 327 millions de dollars.
Depuis mercredi, le tribunal assiste à un défilé du clan familial. Après Donald Trump Jr et Eric Trump, dont l’audition se poursuit vendredi, ce devrait être le tour, lundi, de Donald Trump lui-même.
Ce procès n’est qu’un des nombreux ennuis judiciaires de l’ancien président des États-Unis, inculpé au pénal dans quatre autres dossiers, dont celui devant la justice fédérale à Washington sur les accusations d’avoir tenté de renverser les résultats de la présidentielle de 2020.
Plusieurs procès pénaux l’attendent ainsi en 2024, en pleine campagne pour les primaires du camp républicain que Donald Trump espère remporter pour se présenter à la Maison-Blanche dans un an.
S’il ne risque pas de peine de prison dans le procès civil, l’affaire pourrait lui faire perdre le contrôle d’une partie de son empire immobilier, en plus d’une amende de 250 millions de dollars et l’interdiction de gérer des sociétés à New York. [AFP]