Le chef républicain de la Chambre des représentants a refusé mardi tout vote sur le dernier projet de loi d'aide à l'Ukraine, ignorant ainsi l'appel plus tôt de Joe Biden, qui avait exhorté ses opposants à "choisir l'Amérique" face à la Russie de Vladimir Poutine.
Le rejet du "speaker" républicain vient, comme le craignait Joe Biden, torpiller l'enveloppe, pourtant approuvée mardi par le Sénat, la chambre haute du Congrès, elle à majorité démocrate.
Proche de Donald Trump, probable concurrent de Joe Biden à la présidentielle de novembre, Mike Johnson a affirmé à la presse qu'il n'avait même pas l'intention d'autoriser un vote sur le projet de loi.
"Certainement pas", a-t-il lâché.
Le Sénat a validé cette nouvelle enveloppe de 95 milliards de dollars pour l'Ukraine, Israël et Taïwan, mais son adoption finale dépend des partisans de l'ancien président républicain à la Chambre -- qui refusent donc en l'état d'examiner le texte.
"Je le dis aux républicains de la Chambre: vous devez choisir. Allez vous défendre la liberté ou prendre le parti de la terreur et de la tyrannie? Serez-vous avec l'Ukraine ou avec Poutine? Choisirez-vous l'Amérique ou Trump?" avait dit plus tôt le président démocrate lors d'une courte allocution à la Maison Blanche.
En pleine année électorale, la question s'est transformée en bras de fer entre Joe Biden et son prédécesseur.
- "Tout se marchande" -
Le démocrate de 81 ans a, dans son allocution mardi, étrillé les récents propos de son rival sur l'Otan.
Samedi, Donald Trump avait affirmé qu'il "encouragerait" la Russie à s'en prendre aux pays de l'alliance de défense si ceux-ci ne payaient pas leur part.
"C'est idiot, c'est indigne, c'est dangereux, c'est anti-américain", a asséné Joe Biden.
"Il croit que (l'Otan) est un système de racket. Il ne comprend pas que l'Otan s'appuie sur des principes fondamentaux de liberté, de sécurité et de souveraineté", a poursuivi Joe Biden.
"Pour Trump, les principes ne comptent pas, tout se marchande", a encore dit le président américain.
Reste que le Parti républicain s'est déjà mis en ordre de bataille derrière l'ancien président.
Au Sénat à majorité démocrate, plusieurs républicains ont voté en faveur de l'aide à l'Ukraine, permettant l'adoption du texte à la majorité qualifiée.
Mais c'est une tout autre affaire à la Chambre des représentants, à majorité républicaine. Son président Mike Johnson refuse depuis des mois d'examiner le texte sans changement sur, tout autre sujet, la politique migratoire de l'administration Biden.
"La sécurité nationale commence avec la sécurité à la frontière", a-t-il insisté mardi.
Les républicains demandent que l'aide à l'Ukraine soit couplée à un durcissement de la politique migratoire, dans un contexte d'arrivées record à la frontière avec le Mexique.
- "Comme Trump l'a suggéré" -
Un texte de compromis en ce sens avait récemment été présenté au Sénat. Mais les conservateurs l'ont finalement rejeté, assurant qu'il n'était pas assez ferme.
Difficile de ne pas y voir l'influence de Donald Trump, qui a fait de l'immigration clandestine un thème de campagne majeur et n'entend pas donner de victoire politique à Joe Biden en pleine année électorale.
L'adoption du texte au Sénat a malgré tout été saluée mardi par le président ukrainien Volodymyr Zelensky qui s'est dit "reconnaissant" envers les sénateurs américains.
"Pour nous, en Ukraine, la poursuite de l'aide américaine permet de sauver des vies humaines de la terreur russe" au moment où "nous luttons pour la liberté, la démocratie", a-t-il déclaré sur X.
De ce texte négocié au Congrès dépend en effet la reprise de l'assistance militaire à l'Ukraine, interrompue depuis fin décembre.
Les démocrates y sont, dans l'immense majorité, favorables. Les républicains, eux, sont divisés entre faucons interventionnistes, pro-Ukraine, et lieutenants de Donald Trump, bien plus isolationnistes.
Lundi soir, le sénateur Lindsey Graham, jusqu'ici l'un des premiers soutiens républicains de l'aide à l'Ukraine, a annoncé qu'il s'opposerait finalement à l'adoption de la nouvelle tranche d'aide, préférant à la place un système de prêts... "comme le président Trump l'a suggéré".
Illustration parmi tant d'autres de l'influence écrasante du candidat républicain au Congrès. [AFP]